Lieu: Sévery
Année: en cours

Implantée en marge du centre du village de Sévery, la ferme Girard du Châtelard pourrait presque être qualifiée de « ferme foraine ». Ses larges toitures s’étageant à des hauteurs variées témoignent d’un passé agricole fait de multiples étapes de constructions. Si la substance bâtie ne témoigne pas d’une richesse patrimoniale à sauvegarder absolument, la morphologie dénote d’une présence villageoise forte, avec son corps de logis maçonné au Sud et sa succession de volumes plus légers vers le Nord.

Par un règlement communal intelligent, la ferme du Châtelard est mentionnée comme « volume à préserver » avec un potentiel limité d’extension sur la partie Nord du site. Notre parti est de reconstruire un volume à neuf tout en y intégrant les caractéristiques volumétriques, typologiques et constructives de l’existant. C’est, à notre avis, la seule manière de parvenir à proposer un nombre suffisant de nouveaux logements pour les rendre accessibles grâce à des loyers modérés. Ainsi, le projet propose un long volume qui s’apparente par sa taille aux grandes fermes présentes aux abords du noyau villageois et tente de reproduire le bon sens paysan pour offrir une organisation efficace et intégrée. La volonté est de rechercher une continuité historique dans le projet pour aboutir à une construction neuve qui semble avoir toujours été là. La dépendance au Sud n’est pas reconstruite afin de souligner le volume archétypique de la ferme.

Le projet propose une reconstruction à neuf de la ferme du Châtelard. Cette option permet de rationaliser les coûts et la mise en œuvre, ainsi que d’atteindre une performance énergétique élevée. Sous une grande toiture aux larges avant-toits offrant privacité et protection des façades face aux intempéries et au soleil, se succèdent différents corps de constructions. La tête « en dur » du bâtiment est réalisée en briques crépies ; les dalles entre appartements sont en béton afin d’assurer une masse suffisante pour une bonne isolation phonique et une bonne inertie thermique. A sa suite, une construction sérielle prend place entre les refends en béton successifs selon un entre-axe régulier de 4m60. Cette répétitivité permet la préfabrication de nombreux éléments, gage d’économie de construction et de vitesse de mise en œuvre. Dans cette ossature, les séparations, escaliers et dalles entre étages d’un même appartement sont en bois, tout comme la longue coursive et les balcons. Grace à la prédominance de lignes en bois au premier plan, les vitrages s’estompent et contrastent avec les fenêtres ponctuelles du bâtiment tête, réinterprétant ainsi la grange passée.

 

Les éléments marquants de l’aménagement historique des abords de la ferme comme le potager, la fontaine et l’annexe sont maintenus et réutilisés. Comme dans la configuration actuelle, la zone bordant le bâtiment à l’Est forme une cour donnant accès au petit cabanon des fêtes, au potager et aux logements. Ces derniers se répartissent en trois catégories : les logements en tête, les logements du rez-de-chaussée de la grange et les duplex et triplex des étages de la grange. Le volume de la grange est prolongé au nord en répétant les mêmes modules et en prolongeant la logique des toitures actuelles pour former une continuité. Les 3 logements en tête sont superposés et s’articulent chacun autour d’une loggia orientée au sud. Au rez-de-chaussée de la grange, on trouve 9 habitations de deux et trois pièces traversantes auxquels on accède par l’Est par des petites cour-jardin privatives sur lesquelles les espaces de jour s’orientent. Toute les chambres se tournent vers la zone plus calme du cordon boisé à l’Ouest. Au-dessus de ces logements formant le socle de la grange, 9 autres appartements de 3 et 4 pièces sont desservis à l’Est par une longue coursive à laquelle on accède par trois escaliers distincts. Chaque logement bénéficie d’une petite terrasse privative d’entrée le long de la coursive et d’un grand balcon-loggia à l’Ouest. La typologie très simple mise en place permet d’habiter les pièces soit de manière conventionnelle avec salon et cuisine en bas et 2 à 3 chambres au-dessus, soit de permettre à une personne à mobilité réduite d’avoir sa chambre au niveau de l’entrée avec une salle-de-bain adaptée sur le même étage. Les 21 logements ont tous un emplacement pour une machine à laver le linge, ce qui se montre être un avantage recherché par une grande majorité de locataires. Ils respectent également tous les exigences de la LPPPL pour éviter toute différence de « classe » au sein d’un même projet.

Photos: LVPH architectes, Joël Tettamanti